Le ministre chinois de la Défense, Li Shangfu, a fustigé hier dimanche la création d’alliances militaires “de type Otan” en Asie-Pacifique en prédisant qu’elles plongeront la région dans un “tourbillon” de conflits, rapporte l’AFP.
“Les tentatives visant à promouvoir des (alliances) de type OTAN dans la région Asie-Pacifique sont une façon de kidnapper les pays de cette région et d’exagérer les conflits et les confrontations, ce qui ne fera que plonger l’Asie-Pacifique dans un tourbillon de différends et de conflits”, a averti M. Li lors d’une conférence sur la sécurité organisée dans le cadre du dialogue Shangri-La à Singapour.
“L’Asie-Pacifique d’aujourd’hui a besoin d’une coopération ouverte et inclusive, et non d’un regroupement en petites cliques. Nous ne devons pas oublier les graves désastres causés par les deux guerres mondiales aux peuples de tous les pays, et nous ne devons pas permettre que cette histoire tragique se répète”, a ajouté le ministre.
M. Li n’a nommé aucun pays en particulier, mais ses remarques visent implicitement les Etats-Unis, qui ont renforcé leurs alliances et leurs partenariats dans la région pour contrer l’influence de Pékin.
Les Etats-Unis sont membres de l’alliance AUKUS avec l’Australie et le Royaume-Uni, et du QUAD avec l’Australie, l’Inde et le Japon.
L’avertissement de M. Li intervient au moment où un nouvel incident vient raviver les tensions sino-américaines dans le détroit de Taïwan, la marine des Etats-Unis accusant samedi un navire chinois d’y avoir zigzagué de façon “dangereuse” autour d’un destroyer américain.
Le bâtiment chinois a “exécuté des manœuvres de façon dangereuse près du Chung-Hoon”, un destroyer américain qui naviguait samedi dans le détroit, a indiqué dans un communiqué le commandement américain.
L’incident s’est produit alors que l’USS Chung-Hoon, un destroyer Aegis faisant partie de la flotte américaine du Pacifique, naviguait en compagnie du navire canadien HMCS Montréal dans le détroit de Taïwan, large de 180 km, qui sépare l’île autonome du même nom de la Chine continentale.
L’armée chinoise a indiqué qu’elle avait surveillé le passage des deux navires, mais n’a mentionné aucun incident.
“Les pays concernés créent intentionnellement des troubles dans le détroit de Taïwan, attisent délibérément les risques et sapent malicieusement la paix et la stabilité régionales”, a dénoncé le colonel Shi Yi, porte-parole du commandement Est de la Chine.
Des navires américains traversent régulièrement le détroit de Taïwan mais ils le font rarement accompagné d’un navire allié. Le dernier passage conjoint américano-canadien remonte ainsi à septembre.
Ces passages irritent la Chine, qui considère Taïwan comme une partie de son territoire et affirme avoir des droits souverains sur le détroit.
Il s’agit du deuxième épisode de frictions entre les deux pays en moins de 10 jours dans la région.
Le 26 mai, un pilote d’avion de combat chinois avait effectué “une manœuvre agressive injustifiée” près d’un appareil de reconnaissance américain qui survolait la mer de Chine méridionale, selon des militaires américains.
En réaction aux deux incidents entre les forces des deux pays ces derniers jours, le ministère américain de la Défense a dénoncé dimanche les actions “de plus en plus risquées” de l’armée chinoise en Asie.
“Nous continuons à être préoccupés par les activités de plus en plus risquées et coercitives de l’Armée populaire de libération dans la région, y compris ces derniers jours”, a déclaré le porte-parole du Pentagone, le général de brigade Pat Ryder, qui assiste avec le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin à la conférence de Singapour.
Après avoir brièvement salué son homologue Chinois Li Shangfu lors du dîner d’ouverture de cette conférence, M. Austin avait jugé samedi “essentiel” de renouer le dialogue avec la Chine pour éviter des “malentendus” pouvant mener à un conflit entre les deux pays.
La relance des relations entre les deux puissances a achoppé en début d’année après le survol par un ballon chinois du territoire américain. Et malgré la promesse américaine d’un “dégel”, les deux pays continuent de croiser le fer sur les questions de Taïwan, des revendications territoriales chinoises en mer de Chine ou encore celle stratégique des micropuces.