Toni Morrison, Margaret Kennedy, Colm Tóibín… Le Progrès Egyptien s’est inspiré du site “Télérama.fr” pour vous recommander de nouveaux romans au rayon poche, à glisser dans votre valise.
“Le Magicien”, de Colm Tóibín
Colm Tóibín a écrit, il y a près de quinze ans, l’un des plus beaux romans contemporains qui soient, une pure merveille, Le Maître (2005), désignant ainsi Henry James dont il faisait le héros, non pas d’une fiction biographique, mais d’un roman proprement… jamesien. Se tournant vers Thomas Mann (1875-1955), auquel il consacre Le Magicien, Colm Tóibín change d’approche et de focale pour embrasser, de façon chronologique, l’existence du grand écrivain allemand, qu’il portraiture entouré de son ample tribu, ancrant plus largement sa narration dans un siècle d’histoire de l’Allemagne. Là encore, la singularité du geste de Tóibin passionne et stupéfie.
“Home”, de Toni Morrison
Frank est revenu brisé de la guerre de Corée. A Seattle, dans l’hôpital psychiatrique où il se retrouve parmi les mourants, le vétéran ne pense qu’à fuir. Mais, dans les rues, la violence exacerbée est partout. Frank n’a qu’une obsession : rejoindre sa sœur, chez eux, en Géorgie. Or la route est longue pour un homme noir qui traverse une Amérique où seuls les Blancs peuvent s’afficher. Cent cinquante pages – préfacées dans cette parution par Gaël Fay – il n’en faut pas plus à Toni Morrison pour dessiner une époque et la vie d’un homme qui ne peut rien oublier. Son écriture est concentrée, musicale, pour composer cette fable magistrale ouverte sur une possible rédemption.
“Divorce à l’anglaise”, de Margaret Kennedy
On peut être d’une futilité désarmante et profondément malheureuse. La jolie Betsy Canning a 37 ans et l’impression que tout lui échappe : son mari qui ose réussir sans elle, sa progéniture qui grandit avec indifférence, même ses amis qui prennent leurs distances, lassés de ses manières d’enfant gâtée. En 1936, le divorce reste une exception, mais Betsy veut tenter « l’irréparable », comme dit sa mère. Elle l’annonce vite et fort pour en constater les effets domino. Margaret Kennedy (1896-1967), autrice du Festin et de La Nymphe au cœur fidèle, brosse un portrait social et sentimental de la bonne société anglaise dans ce roman cruel où les belles-mères sont redoutables, les enfants complètement oubliés et les couples plus maladroits que convaincus…
“Les Paralysés”, de Richard Krawiec
Avec la parution de ce quatrième roman de Richard Krawiec, Les Paralysés, plus aucun doute ne subsiste. L’auteur américain est un sacré écrivain et ses textes constituent d’ores et déjà une œuvre. Le livre est une plongée d’une singulière noirceur dans une cité à l’écart d’une grande ville américaine, au tout début des années 1970. Un quartier métissé d’immeubles délabrés, envahis par les rats et les cafards, plombé par la misère crasse, le chômage, la drogue, la prostitution. Une cité d’invisibles, abandonnés à eux-mêmes, exploités par les pires raclures, assignés à cette boue si profonde et collante que les espoirs d’en sortir sont quasi nuls. Par son réalisme et son âpreté, ce roman vous saute à la figure, mais sans la moindre complaisance. Richard Krawiec ne cherche pas à choquer, mais à ouvrir les yeux sur la société telle qu’elle est. Son regard est d’une justesse sans pathos ni voyeurisme.