En se promenant dans la rue, quelques heures avant l’iftar (l’heure de la rupture du jeûne), un jeune garçon m’a abordée. « Vous avez l’air bon et vous allez sans doute me donner de quoi assouvir ma faim », a-t-il lâché avec une insistance déconcertante, un sourire timoré aux lèvres. Prise au dépourvu, je lui ai instinctivement tendu deux billets… Et sans faire machine arrière, j’ai avancé,la tête happée par une série d’interrogations. J’ai commencé à réfléchir aux implications de mon geste. Faut-il ou pas venir en aide aux mendiants ? Cet argent qu’on leur donne leur est-il utile en vérité ?
Par : Hanaa Khachaba
Avec son regard attendrissant, ses mots qui pénètrent droit au cœur, il vous désarçonne. Et vous, dont l’âme est sensible et le cœur sur la main, cédez. Ils sont nombreux ces enfants déscolarisés qui arpentent les rues tendant la main. Autant encore stationnent aux feux tricolores pour quémander. Sont-ils vraiment dans le besoin ? Votre argent les aidera-t-il vraiment ou, au contraire, les encouragera à continuer à mener cette existence errante à la merci des passants ?Déscolarisés à contre gré au vu de leurs conditions familiales difficiles ou faisant école buissonnière pour gagner de l’argent, les conséquences sont les mêmes. Lâchés dans la rue, victimes de la cruauté du sort, ils font la manche. Les dépenses de cet argent facile varient d’un cas à l’autre…

Faut-il venir en aide aux mendiants ?
Cette question, apparemment simple, soulève en réalité une multitude de considérations éthiques et pratiques. D’un côté, il y a l’impératif moral de la solidarité humaine : comment rester insensible face à la détresse d’un enfant, surtout lorsqu’il nous regarde avec des yeux implorants ? D’un autre côté, il y a la crainte que notre aide ne soit qu’une goutte d’eau dans un océan de problèmes plus vastes, voire qu’elle contribue à perpétuer un cycle de dépendance et d’exploitation.
Les enfants des rues, victimes ou acteurs ?
Les enfants qui mendient dans les rues sont souvent des victimes de circonstances économiques et sociales défavorables. Beaucoup sont déscolarisés, privés de l’éducation qui pourrait leur offrir une porte de sortie vers un avenir meilleur. Ils arpentent les trottoirs, tendant la main aux passants, dans l’espoir de récolter quelques pièces ou billets. Mais sont-ils vraiment les bénéficiaires de l’argent qu’ils reçoivent ? Ou sont-ils exploités par des adultes sans scrupules qui profitent de leur vulnérabilité ? Beaucoup d’enfants sont enlevés de leurs familles et entraînés à faire l’aumône pour subvenir aux besoins de leurs kidnappeurs. Il existe également des enfants mutilés par exprès pour susciter la compassion des passants aux âmes sensibles. D’autres apprennent la ruse et commencent à aiguiser les compétences latentes d’un vrai arnac…Cet argent gagné ne fera que perdurer cette spirale d’escroquerie et de mesquinerie. Mais si l’on coupe ce robinet, il se peut que ces réseaux de mendicité soient démantelés au plus vite.
L’argent, solution ou problème ?
Donner de l’argent à un mendiant peut sembler être une solution rapide et facile à un problème complexe. Cependant, cette approche comporte des risques. L’argent peut être utilisé pour acheter de la nourriture ou des vêtements, mais il peut aussi être confisqué par des adultes ou des réseaux criminels pour acheter de la drogue ou commettre l’irréparable. Pire encore, il peut encourager les enfants à continuer à mendier, les privant ainsi de l’opportunité de retourner à l’école ou de bénéficier de programmes de réinsertion.

Vers des solutions durables
Plutôt que de donner de l’argent directement aux mendiants, il pourrait être plus efficace de soutenir des organisations qui travaillent sur des solutions durables. Ces organisations peuvent offrir une aide concrète, comme l’accès à l’éducation, à la formation professionnelle, ou à des programmes de réinsertion sociale. En soutenant ces initiatives, nous pouvons contribuer à briser le cycle de la pauvreté et offrir aux enfants des rues une véritable chance de construire un avenir meilleur.
Cette rencontre avec ce jeune garçon m’a laissée songeuse. Elle m’a rappelé que la générosité ne se mesure pas seulement en termes d’argent donné, mais aussi en termes d’engagement à trouver des solutions durables aux problèmes de notre société. En tant qu’individus, nous avons le pouvoir de faire une différence, non pas en donnant quelques pièces, mais en soutenant des initiatives qui peuvent transformer des vies. C’est ainsi que nous pourrons véritablement aider ceux qui en ont le plus besoin.