Le départ des troupes américaines d’Afghanistan a engendré un nouveau « Grand Jeu » entre les puissances qui cherchent à s’adapter aux réalités géopolitiques régionales, toujours en mouvement. Pour l’Inde, le dossier afghan reste épineux et s’ajoute aux contentieux pesant sur ses relations avec le Pakistan et la Chine, même si New Delhi renforce ses partenariats dans l’Indo-Pacifique avec, au premier chef, les États-Unis, analysait Le Monde diplomatique dans son édition de décembre 2021. Après le retrait américain et la restauration de l’Émirat islamique d’Afghanistan, la victoire des talibans ne fait qu’aggraver la crise humanitaire dont souffre une population déjà épuisée par quarante ans de conflits. Sans surprise, les grandes puissances manœuvrent pour s’adapter aux réalités géopolitiques régionales, encore fluctuantes, le nouveau régime n’ayant été reconnu pour l’heure par aucun pays. Si le « Grand Jeu » du XIXe siècle et du début du XXe, entre empires britannique et russe, se déployait à l’heure où l’empire chinois s’affaiblissait, celui d’aujourd’hui voit la Chine dans une position de force inédite, sans être omnipotente. Quant à l’Inde, le retour des talibans l’a placée dans une situation délicate. Alors que de nombreux pays avaient fini, au fil des ans, par recevoir officiellement les émissaires des insurgés, New Delhi avait choisi une ligne opposée, cultivant ses relations avec les seuls gouvernements des présidents Hamid Karzaï (2001-2014) puis Ashraf Ghani (2014-2021). L’histoire indo-afghane remonte à des millénaires et ne saurait être oubliée, même si elle fâche les nationalistes hindous toujours prompts à dénoncer les périodes où la grande Inde fut soumise au « joug de l’Islam » (lire « Depuis Alexandre le Grand »).