












Il est des villes dont l’âme s’exprime mieux par la couleur que par les mots. Rosette – ou Rashid – est de celles-là. Entre histoire, architecture et murmures du Nil, cette cité millénaire s’est offerte aux regards inspirés de dix-sept artistes, réunis autour du « Salon des Arts de Rosette pour la peinture et la photographie », inauguré avec émotion à la salle Adam Henein du centre El-Hanager, au Caire.
Sous l’égide du ministre de la Culture, Dr Ahmed Fouad Hano, et organisé par l’Autorité générale des palais de la culture présidée par le général Khaled Lebban, l’événement s’inscrit dans le programme artistique du ministère, avec la coordination de l’écrivain Mohamed Nassef, vice-président de l’institution. Le vernissage a été honoré par la présence de Tarek El-Koumy, président du syndicat des artistes plasticiens, Dr Emad Abou Zeid, commissaire général de l’exposition, et Viviane El-Batanouni, directrice générale des arts plastiques à l’institution.
L’exposition présente 36 œuvres aussi diverses que profondes, reflet d’une rencontre entre générations, regards et émotions. Chaque tableau est un éclat d’histoire, une fenêtre sur les pierres, les toits, les eaux et les visages de Rosette. Les artistes, parmi lesquels Sabah Naïm, Hani Rizk, Farah Amr Salama, ou encore Dr Fatma Adel, ont exploré les moindres recoins de la ville : mosquées suspendues, moulins anciens, maisons ornées de mashrabiyas et barques de pêche aux lignes poétiques.
Viviane El-Batanouni a rappelé que ce salon s’inscrit dans le projet ambitieux « Description de l’Egypte », initié en 2019, dont l’objectif est de faire le portrait artistique contemporain des différentes régions du pays. Après Rosette, les escales prochaines mèneront à Sohag, Assiout, Gharbia et Sharqia.
Mais pourquoi Rosette ? Parce qu’elle incarne une croisée des cultures, un carrefour de civilisations, un trésor d’architecture islamique et ottomane, un lieu encore vibrant du passage de Bonaparte et des révoltes populaires. Le commissaire Emad Abou Zeid a souligné combien cette ville invite au dialogue visuel et mémoriel, chaque œuvre devenant une chronique silencieuse de son patrimoine vivant.
Le public a pu découvrir des œuvres puissantes et poétiques, comme « Le pêcheur de Rosette » d’Amany Zahran, ou encore la représentation de « Zubaida », cette figure historique égyptienne au destin lié à l’occupation française. Mohamed Dessouki, Rasha Suleiman ou Yara Hatem ont chacun saisi l’essence de la ville à travers leurs toiles, révélant ses mosquées anciennes, ses ruelles pleines de vie, ses scènes de pêche, et même le musée de Zubaida, autrefois maison noble devenue mémoire ouverte.
Les artistes ne peignent pas seulement la ville : ils la racontent, l’écoutent et la célèbrent. Les jeux d’ombres et de lumière, les détails des toitures, les motifs sculptés dans le bois, les textures de la pierre noire de Rosette… tout parle de beauté, d’endurance et d’identité.
En clôture de la cérémonie, les participants ont été honorés par des certificats de reconnaissance, marquant l’importance de leur contribution à cette fresque collective.
Ce salon, né du séminaire artistique tenu à Beheira en septembre dernier, en coopération avec la région culturelle Ouest et Centre-Delta, restera ouvert jusqu’au 27 avril, offrant au public un voyage sensible au cœur d’une ville qui mérite qu’on la regarde – et qu’on l’aime – autrement. Car parfois, il suffit d’un pinceau pour faire revivre une mémoire.