Faire taire les armes
La cause palestinienne figure toujours en tête des priorités de la politique étrangère de l’Egypte et des présidents égyptiens et arabes depuis 1948. A tous les stades, la question palestinienne n’était pas une cause, elle constitue une partie intégrante de la sécurité égyptienne de l’Egypte. Le président Abdel Fattah Al-Sissi, a organisé un « sommet pour la paix » à tonalité principalement euro-arabe. En multipliant les efforts diplomatiques, l’Egypte s’impose comme acteur incontournable dans la crise ouverte par la guerre entre le Hamas et Israël.
Par : Marwa Mourad

L’Egypte est déterminée à renouer avec son rôle de poids lourd de la diplomatie arabe. Le « sommet pour la paix » organisé par le Caire intervient dans le cadre du grand intérêt accordé par l’Egypte, gouvernement et peuple, à désamorcer la crise.
Dans le conflit qui oppose depuis un demi-siècle Israël aux Palestiniens, l’Egypte n’a épargné aucun effort pour parvenir à une solution équitable. Le Caire s’est toujours placé à la table des négociations. Le gouvernement égyptien a multiplié les médiations pour parvenir à un accord entre les parties rivales, et convaincre Israël de la nécessité d’un Etat palestinien autonome. La cause palestinienne n’a jamais été un document de tractations régionales ou internationales, et la relation étroite entre l’Egypte et la cause palestinienne n’a donc pas été affecté par le changement du régime.
Avec l’intensification sans précédent des bombardements de l’armée israélienne sur la bande de Gaza en réponse à l’opération « Déluge d’Al-Aqsa » lancée par le mouvement Hamas le 7 octobre 2023, tous les regards se braquent vers le Caire, le médiateur incontournable à chaque nouvelle flambée de violence entre le Hamas et Israël. En effet, dès le déclenchement de la crise, l’Egypte est entrée en action en menant une série de contacts intensifs à tous les niveaux afin de contenir l’escalade de la situation. Un communiqué du ministère égyptien des Affaires étrangères a mis en garde contre le fait que « l’escalade actuelle risque de faire entrer la région toute entière dans un cercle vicieux de tensions menaçant la stabilité et la sécurité régionales ». Le communiqué a exhorté Israël à mettre fin aux attaques et aux actions provocatrices contre le peuple palestinien et à adhérer aux principes du droit humanitaire international en ce qui concerne les responsabilités d’un Etat occupant.
Selon le conseiller Ahmed Fahmy, porte-parole officiel de la présidence égyptienne, « l’Egypte est en contact direct avec les parties israélienne et palestinienne, ainsi qu’avec les parties régionales et internationales depuis le début du déclenchement de la crise jusqu’à présent, que ce soit au niveau du président Abdel Fattah Al-Sissi ou du ministère des Affaires étrangères et des parties concernées ».

Le Sommet du Caire
Une trentaine de représentants de pays et d’organisations internationales étaient réunis dans la « Nouvelle capitale administrative » du Caire. Parmi eux, le roi Abdallah II de Jordanie, l’émir du Qatar, Tamim Ben Hamad Al Thani, le président des Emirats arabes unis, Mohammed Ben Zayed, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell et la Première ministre italienne, Giorgia Meloni. Les Etats-Unis étaient absents.
Ce sommet a été préparé en quelques jours. Depuis le début de l’offensive israélienne massive contre la bande de Gaza suite à l’attaque du Hamas le 7 octobre, Abdel Fattah Al-Sissi multiplie les condamnations d’une « punition collective » imposée aux habitants de l’enclave. L’ampleur des destructions y est inédite et déjà plus de 4 100 palestiniens ont été tués, selon le Hamas. Le président a réaffirmé la nécessité de mettre fin au conflit en cours.
Dans la foulée de ses alliés arabes, le président Abdel Fatah Al-Sissi a déclaré le 15 octobre que les opérations de l’armée israélienne avaient dépassé toute réponse proportionnée à l’attaque terroriste du 7 octobre et étaient devenues une forme de punition collective. Malgré cette condamnation, l’Egypte continue à jouer son traditionnel et essentiel rôle de médiateur.
Lors de chaque embrasement entre Israël et les Palestiniens, l’Egypte joue ce rôle. Le « Sommet pour la paix » a tenté d’obtenir un cessez-le-feu, pour l’heure bien illusoire.

Un engagement historique
Le rôle égyptien repose sur des piliers fondamentaux et historiques. L’Egypte possède un engagement historique envers la cause palestinienne qui constitue une partie intégrante de la sécurité nationale égyptienne. En plus, le Caire est presque la seule partie à disposer de canaux de communication solides et fiables avec les deux parties. Ce qui lui confère un avantage dans la médiation dans les différents conflits.
En outre, pour l’Egypte, il ne s’agit pas uniquement de faire taire les armes, mais son objectif ultime aussi est de remettre sur les rails le processus de paix, en état de gel depuis des années, et de convaincre le monde de la justesse de la cause palestinienne et de l’importance d’un règlement.
C’est pourquoi des sources égyptiennes de haut niveau viennent de mettre en garde, dans des déclarations aux médias égyptiens, contre les appels exhortant de faire pousser les civils palestiniens vers les frontières égyptiennes afin de vider la bande de Gaza de sa population. Ce déplacement des habitants de Gaza suffit pour « liquider la cause palestinienne elle-même ». Les sources ont averti également que les frontières égyptiennes sont intouchables et c’est à Israël en tant qu’un Etat occupant d’avoir la responsabilité de créer des couloirs humanitaires pour secourir la population de Gaza.
La Palestine toujours à la Une de l’agenda des présidents égyptiens
La question palestinienne constitue une partie intégrante de la sécurité égyptienne même après Gamal Abdel Nasser. Les présidents égyptiens lui accordent un intérêt particulier. La cause palestinienne était et restera toujours à l’affiche de leur agenda.
Par: Soha Gaafar
Un nouvel élément a été apporté à la situation par la visite du président égyptien Anouar El Sadate à Jérusalem qui a abouti aux Accords de Camp David et à la signature d’un traité de paix entre les deux pays et la reconnaissance des droits légitimes des Palestiniens. L’Egypte sous Moubarak a, certes, soutenu également la réconciliation interpalestinienne, car les divisions entre factions compromettaient toute chance de reprise des négociations de paix avec Israël. Nous abordons en quelques lignes le rôle de la diplomatie égyptienne depuis 1964.

Abdel Nasser et le triple Non
Le président Abdel Al Nasser a convoqué la tenue d’un sommet à Khartoum pour discuter de la question palestinienne. Il avait opté pour un triple non à l’Etat hébreu (paix, négociation, reconnaissance) et réaffirmé le droit des palestiniens à leur pays. Il a de même réussi à unifier le rang palestinien et à proposer la naissance de l’organisation de libération de la Palestine (OLP).

Sadate, symbole de la victoire et de la paix
Depuis 1971, Sadate en est persuadé : il faut faire la paix avec Israël. Le 19 novembre 1977, il s’est rendu à Tel-Aviv. Cette visite constitue un tournant capital qui changera profondément l’équation proche-orientale. Le leader égyptien apparaît en effet comme un héros qui a effacé le traumatisme de la guerre des Six-Jours et fait comprendre à Israël qu’il était de son intérêt d’engager un processus diplomatique crédible, un retrait d’Israël de tous les territoires occupés en juin 1967 et une constitution d’une patrie pour les Palestiniens.
La dernière mission de Sadate était l’appel à la reconnaissance mutuelle des Palestiniens et Israéliens.
La révolution du 25 janvier était le noyau permettant de récupérer l’équilibre et la profondeur stratégique des relations internationales de l’Egypte en général et la réhabilitation de la position historique de l’Egypte sur le volet arabe et régional.
La réconciliation palestinienne reflète le rôle de l’Egypte soutenant la Cause palestinienne depuis son début. Le rôle axial de l’Egypte dans le renforcement de toutes les séances du dialogue inter-palestinien vise en premier lieu à unir les factions palestiniennes et à rejeter les allégations israéliennes concernant l’inexistence d’un négociateur parlant au nom de tous les Palestiniens. Les efforts de la politique étrangère égyptienne a réussi à unir les Palestiniens.
La direction égyptienne a réussi en mai 2011 à convaincre les deux mouvements de Fatah et de Hamas à signer un accord de réconciliation sous l’égide de l’Egypte. Par ailleurs, l’Egypte a déployé d’énormes efforts afin que la Palestine devienne un membre de l’UNESCO.