« La cupidité est la racine de tous les maux », dit un proverbe biblique. Cette maladie chronique sans remède consume l’âme de l’homme. Avec l’apparition des influenceurs, des Youtubeurs et de ceux que l’on appelle « créateurs de contenu », la cupidité devient le fléau de l’époque. Elle est considérée comme une drogue : plus on en a, plus on en veut, et plus on en a besoin. La cupidité et le gain rapide, deux vices inséparables, caractérisent certains créateurs de contenu qui ont envie de s’enrichir à tout prix. Les plateformes à gains immoraux deviennent une véritable bombe à retardement…Débat.
Par : Hanaa Khachaba
La cupidité n’a pas de nationalité. Le manque d’éthique non plus. La cupidité et le gain rapide déloyal sont deux concepts qui ont longtemps été associés dans l’histoire de l’humanité. La cupidité, ce désir insatiable d’acquérir plus de richesses et de pouvoir à tout prix, est l’autre face du gain rapide qui est souvent atteint par des moyens illégaux ou immoraux.
Il est malencontreusement vrai que certaines personnes sur YouTube peuvent être considérées comme des « créateurs de contenu sans scrupules », qui cherchent à gagner de l’argent à tout prix, même si cela implique des pratiques douteuses ou trompeuses. Ces pratiques peuvent inclure l’utilisation de titres trompeurs ou de miniatures accrocheuses pour attirer des clics, la promotion de produits ou services de manière peu claire ou agressive, ou encore la création de vidéos sensationnalistes ou controversées simplement pour attirer l’attention.
Cependant, il est important de noter que la grande majorité des créateurs de contenu sur YouTube sont des personnes honnêtes et passionnées qui cherchent simplement à partager leur travail et leur vision avec un public plus large. Beaucoup d’entre eux travaillent dur pour fournir un contenu de qualité et construire une communauté de soutien autour de leur chaîne, souvent sans gagner beaucoup d’argent en retour.
Les influenceurs sur la sellette
De nombreux blogueurs et influenceurs, avec ou sans scrupules, envahissent les plateformes. Certains sont critiqués pour leur manque d’éthique dans leurs pratiques commerciales ou de marketing en ligne ou dans leurs contenus où ils filment des scènes de leur quotidien.
« Routini al-Yawmi », ou ma routine de tous les jours, est devenu un titre sur toutes les lèvres. Certaines créatrices de contenu exploitent leur chaîne YouTube ou autre plateforme, à des fins immorales. Leurs moyens peuvent varier. L’objectif reste pourtant le même : atteindre des « likes » par milliers et s’enrichir rapidement. Certains ont été accusés de promouvoir des produits ou des services qui ne fonctionnent pas ou qui sont dangereux pour la santé, en échange d’une rémunération ou d’une commission. D’autres ont été critiqués pour leur manque de transparence dans leur relation avec les marques et les entreprises qu’ils promeuvent, en ne divulguant pas clairement les détails de leur partenariat ou de leur rémunération.
En effet, il y a eu plusieurs cas de blogueurs et d’influenceurs qui ont été critiqués pour leur manque d’éthique. Par exemple, en Egypte, une blogueuse a été critiquée pour avoir promu un produit pour blanchir la peau, ce qui a été considéré comme raciste et offensant. Une autre, dénommée Héba Sayed, a fait le buzz. En août 2020, elle a été arrêtée avec son mari et deux autres personnes pour des accusations de trafic humain. Selon les rapports, elle aurait kidnappé et maltraité des filles mineures pour les forcer à travailler comme domestiques chez elle. Les filles auraient été battues, affamées et privées de sommeil.
L’affaire a suscité une grande attention et a été largement couverte par les médias en Egypte et dans le monde. Héba Sayed a nié les accusations, affirmant qu’elle avait engagé les filles à titre de travailleuses domestiques et qu’elle les avait bien traitées. Cependant, elle a été poursuivie en justice et a été placée en détention provisoire en attendant son procès.
Cette affaire a mis en lumière la question du trafic des êtres humains en Egypte et la nécessité de protéger l’audience des plateformes des pratiques outrées des créateurs de contenu. En outre, elle a ouvert grands les yeux sur les excès de limite de certains de ces soi-disant influenceurs dont les gains sont douteux. Les autorités égyptiennes ont pris des mesures pour lutter contre la traite des êtres humains, en renforçant les lois et en lançant des campagnes de sensibilisation. Cependant, il reste beaucoup à faire pour mettre fin à la traite des êtres humains dans le pays.
Une atteinte aux mœurs
Une autre « Héba Sayed » a récemment été accusée de traite humaine après avoir parlé sur sa chaîne d’une affaire « d’inceste » entre son fils et sa fille. La Youtubeuse a brisé tous les tabous en filmant ses deux enfants dans une position indécente pour ensuite diffuser la scène ! Les « vues » sont, tout naturellement, montées en flèche. La course intrépide derrière l’argent a aveuglé cette « mère ». Elle l’a poussée à faire l’infaisable en vue d’acquérir des likes et d’élargir son audience au détriment de la réputation de ses propres enfants. En ce qui concerne les accusations portées contre Héba Sayed, le Parquet a décidé de la déférer devant la Cour d’assises pour qu’elle soit punie pour les accusations de traite d’êtres humains en traitant avec des personnes physiques -à savoir ses enfants- en les exploitant pour les montrer dans des clips vidéo qu’elle a publiés sur ses comptes de médias sociaux, violant ainsi les principes et les valeurs de la famille égyptienne et mettant en danger la vie de ses enfants.
Le Parquet a établi les éléments de preuve contre l’accusée, son fils et son mari au moyen des procédures d’enquête qu’il a lancées immédiatement après la vidéo diffusée par l’accusée en avril dernier. Cette dernière a reconnu les faits, affirmant qu’elle et son fils avaient décidé d’exploiter l’apparition de ses deux autres enfants dans les clips afin d’augmenter les « vues » et de gagner par la suite plus d’argent. Son fils aîné et son deuxième époux font face aux mêmes accusations pour avoir aidé Héba à gérer le contenu de sa chaîne YouTube.
Un autre exemple, aux Etats-Unis, une youtubeuse a été critiquée pour avoir promu un régime alimentaire extrême et dangereux pour la santé.
Au Maroc, une certaine Fatima est confrontée aux presque mêmes accusations que l’Égyptienne Héba Sayed. La blogueuse Fatiha, créatrice de « ma routine », et son mari ont été arrêtés et placés en détention provisoire pour atteinte à la morale et à la pudeur. Les éléments de la police judiciaire de Témara ont arrêté la blogueuse et son mari, suite aux investigations qui ont prouvé que la youtubeuse Fatiha a délibérément filmé des scènes indécentes à son domicile et aurait procédé à leur diffusion sur une plateforme numérique.
Et plus grave encore, ces contenus numériques portant atteinte aux mœurs et la morale publique ont été largement diffusés par la blogueuse sur sa chaîne YouTube, avec pour intention d’en tirer le plus de bénéfices possibles.
C’est une curieuse tendance sur les réseaux sociaux ! Avec l’apparition de vidéos de femmes qui filment leur quotidien, YouTube et les autres plateformes ont vu la floraison d’un nouveau commerce, celui de son corps. Pour la petite histoire, certaines de ces vidéos viennent de l’étranger et sont doublées pour intéresser les nationaux. Les « routineuses » poussent le bouchon un peu loin ! De simples conseils de « bonnes ménagères », leurs vidéos sur YouTube s’apparentent de plus en plus à du « porno soft ».
Préparer un soi-disant gâteau !
Exemple de scène : Une dame bien en chair, en pyjama léger couvrant à peine ses rondeurs, semble absorbée par une tâche ménagère. Apparemment elle prépare un gâteau. On devine en fait ce qu’elle fait car au lieu de filmer ladite préparation, la caméra fait, bizarrement, un focus accentué sur le postérieur de la bonne ménagère. Pire, cette dernière ne ménage aucun effort pour le dandiner à tout va ! Finalement, le spectateur a droit à 20 minutes… de postérieur saupoudré de sensualité vulgaire, lit-on sur lepetitjournalmarocain. Le gâteau en question ? On s’en bat les reins ! La youtubeuse, elle, a bien compris la recette. Pour attirer les vues, le gâteau n’est pas le meilleur atout marketing pour rentabiliser sa chaîne YouTube.
Personne ne croit à cette couverture de conseils quotidiens ou de tâches ménagères et pourtant tout le monde joue le jeu. Des scènes trop suggestives avec des décolletés trop échancrés, des zooms accentués sur les postérieurs, des accoutrements trop légers, saillants et même transparents sans parler de la gestuelle vulgairement érotiques… C’est carrément du porno soft et ça se déroule tranquillement devant les yeux de tout le monde. Vivement une régulation légale et éthique de cet espace et des limites à cette pseudo-liberté cybernétique. Les valeurs et les mœurs de toute une société sont menacées. Sans la demande, cette offre-là aurait pu pourrir et disparaître d’elle-même… Mais elle est nourrie au quotidien par des followers insatiables…
Des solutions, y en a-t-il ?
Il n’y a pas de solution simple et radicale pour mettre fin au phénomène de « gain sans éthique » des influenceurs et des créateurs de contenu sur les plateformes telles que YouTube. Cependant, il y a plusieurs mesures que les plateformes elles-mêmes peuvent prendre pour encourager des pratiques plus éthiques.
Tout d’abord, les plateformes peuvent renforcer leurs règles et leurs réglementations pour s’assurer que les créateurs de contenu ne peuvent pas utiliser des pratiques douteuses pour gagner de l’argent. Cela peut inclure des règles sur la transparence des promotions de produits, des restrictions sur les titres et les miniatures trompeurs, ainsi que des interdictions sur les contenus controversés ou dangereux.
Les plateformes peuvent également mettre en place des programmes de formation et de sensibilisation pour aider les créateurs de contenu à comprendre les pratiques éthiques et à éviter les pièges de la recherche de gains financiers à tout prix.
Enfin, les utilisateurs eux-mêmes peuvent jouer un rôle important en signalant les contenus problématiques et en soutenant les créateurs de contenu qui adoptent des pratiques éthiques. Une approche multidimensionnelle impliquant la collaboration des plateformes, des créateurs de contenu et des utilisateurs peut aider à promouvoir des pratiques plus éthiques et responsables sur les plateformes de médias sociaux.