L’artiste égyptien Ibrahim El-Baridi rend hommage au patrimoine culturel égyptien et arabe dans son exposition “Ya Am Ya Gamal” (Oh, toi le chamelier !), accueillie par la galerie Nout dans le quartier de Zamalek au Caire. Ouverte jusqu’au 20 novembre, cette exposition présente 50 œuvres de tailles variées réalisées à partir de chutes de tissu, une technique qu’El-Baridi appelle “Marj Khit”. À travers ces créations, il réinterprète proverbes, chansons et récits populaires célébrant le chameau et son chamelier, figures emblématiques du folklore. Les œuvres d’Ibrahim El-Baridi puisent leur inspiration dans des chansons populaires comme “Bie El-Gamal Ya Ali” de la chanteuse jordanienne Samira Tawfiq, ainsi que dans des refrains égyptiens tels que “Ya Bet Gamalak Habashni” et “Ya Am Ya Gamal”. Les proverbes du patrimoine sont également à l’honneur, avec des expressions riches de symboles : “Qattatou Gamal” (surévaluation des biens perdus), “Elly Yerabby Gamal Ye’alli Bab Darou” (adaptation nécessaire pour élever un chameau), ou encore “La Naqat Li Wala Gamal” (marquant la neutralité face à une situation). Ces références ancrent les œuvres dans une tradition tout en les réinventant avec modernité.
Pour Ibrahim El-Baridi, le chameau dépasse son rôle d’animal du quotidien pour devenir un symbole culturel. Il est particulièrement emblématique dans le monde arabe, notamment en Arabie saoudite où des festivals de courses de chameaux célèbrent son importance. « J’ai voulu raviver ces images et ces récits qui façonnent notre mémoire collective », explique l’artiste. Afin de donner vie à ses idées, El-Baridi a choisi des couleurs vives et des formes caricaturales pour ses chameaux, les rendant accessibles à un public jeune. Il a travaillé avec des tissus en coton, notamment des pièces venues du Pakistan comme le *til dag*, ainsi que du feutre et des textiles recyclés qu’il accumule dans son atelier. Pour lui, ces matières naturelles et familières renforcent la connexion avec le spectateur. El-Baridi cherche à toucher un public large et varié.
« Je ne m’adresse pas aux spécialistes ni aux universitaires. Mon objectif est que chacun, adulte ou enfant, comprenne mes œuvres et y trouve de la joie », souligne-t-il. En mêlant simplicité, humour et créativité, il transforme des matériaux modestes en œuvres empreintes de profondeur et de légèreté. Ibrahim El-Baridi n’en est pas à sa première exploration du patrimoine à travers l’art textile. Lors d’expositions précédentes, comme “Nafsy Arga’ Tefl Saghir” (Je voudrais redevenir un enfant), il a exploré l’univers de l’enfance avec des poupées de tissu. Une autre de ses expositions, inspirée de l’opérette “El Leila El Kebira”, lui a valu le Prix d’encouragement de l’État. Avec “Ya Am Ya Gamal”, Ibrahim El-Baridi continue d’utiliser son talent pour préserver et réinventer le patrimoine populaire. Ses œuvres, qui allient humour, poésie et hommage à la tradition, rappellent combien l’art peut transformer les objets du quotidien en un langage universel.