Personnalité exceptionnelle au caractère bien encré reflétant des traits contradictoires mais complémentaires. Elle est très romantique et raisonnable, tellement tendre et tranchante, très douce et de très forte personnalité. Certes, toutes ces caractéristiques ne sont pas faciles à se trouver dans une seule personne. Sauf que l’écrivaine Samah Abou Bakr Ezzat les englobe à elle seule. Son amour inconditionnel des bambins l’a conduit vers la littérature pour enfants. Toujours passionnée par la lecture et la poésie, « je consacrais beaucoup de mon temps à lire », déclare la romancière. Elle n’est pas une narratrice ordinaire des romans pour enfants. Elle ne l’affiche pas comme un téléspectateur ordinaire, mais l’implique comme héros principal dans l’histoire. Avec une voix tranchante et à cœur ouvert, elle s’exprime au Progrès Egyptien. Interview
• Le Progrès Egyptien : Qui est Samah Abou Bakr Ezzat ? Aimeriez-vous nous la présenter?
• • Samah Abou Bakr Ezzat : Je suis mère de deux enfants, Omar et Aly. J’ai fais mes études de bases dans les Ecoles Franciscaines en Egypte. Je suis ensuite admise à la Faculté de Commerce, section française. Après avoir terminé mes études, je n’ai pas travaillé dans mon domaine de spécialisation. J’ai plutôt travaillé à la réservation des billets d’avion dans la compagnie aérienne sud-coréenne. J’ai beaucoup voyagé en Corée du Sud, à Séoul notamment. Ça a été une occasion pour moi d’apprendre en autodidacte la langue sud-coréenne, qui était un outil de communication nécessaire. Bien que ce fut une période de deux ans mais cette experience m’a beaucoup aidé. Parce qu’elle m’apprit comment assumer la responsabilité. J’ai dû affronter des situations embarrassantes dont j’ai beaucoup tiré bénéfice. Ensuite, j’ai travaillé à Maspero (Maison de la Radio et la Télévision égyptienne), au département économique chargé de traduc-tion et de marketing de toutes les œuvres produites par l’Union de la Radio et de la Télévision (ERTU ) pour les pays francophones et vis vers ça. Aussi nous recevions des œuvres d’une chaîne française qui étaient traduites vers l’arabe.
• Le Progrès Egyptien : Avez-vous travaillez seulement au Caire ?
• • SABE : Pas seulement. Quelques années plus tard, je me suis déplacée à l’Ismaïlia, où j’ai été présentatrice de programme en chef à la télévision du Canal, l’une des chaînes de l’ERTU. J’ai aussi présente l’émission pour enfants “Raconte mama Samah” parallèlement à mon travail principal.Je suis très attachée à mon école, la raison pour laquelle j’enregistre quelques épisodes de mon émission télévisée dans la cour. L’une des choses qui m’ont beau-coup marquée est le fait que j’ai été l’hôte du Centre Culturel égyptien à Paris lors d’un atelier de narration pour enfants. Il avait organisé un ate-lier ayant comme thème “Don et acceptation d’autrui”. La salle était pleine d’audience dont la plupart était des enfants. C’était une occasion propice pour discuter avec les enfants de mes romans surtout.“Le jeu extraordinaire” Tellement passionnée par l’Egypte ancienne et sa civilisation, je docu-mente des infos des monuments et des personnalités historiques. J’ai écrit un livre pour enfants intitulé “Dans ma poche, une citadelle et un temple”. Ce livre a eu un succès extraordinaire dans la plupart des pays européens.Je voulais ainsi expliquer aux petits bouts de chou que l’Histoire n’est pas seulement gravée sur les murs des temples, mais nous la portons aussi dans nos poches à travers les pièces de monnaie. Ce livre se trouve aujourd’hui à la bibliothèque nationale de Madrid, en Espagne et sur l’étagère de la plupart des librairies européennes. Aujourd’hui, je suis l’auteure d’une cinquantaine de romans pour enfants. Ce sont le fruit de mes efforts.
• Le Progrès Egyptien : Comment est né votre amour pour l’écriture des romans pour enfants?
• • SABE : Au fait, ma mère Kawthar Heikel était tellement occu-pée, elle travaillait à la télévision. C’est pourquoi, je passais la plupart de mon temps avec ma grand-mère. Elle était une narratrice exception-nelle. Elle me relatait des romans d’une façon adorable. Lorsqu’elle me racontait un roman, j’aimais beaucoup l’écouter même si je le connaissais l’histoire. C’est de ma grand-mère que j’ai appris l’amour de narration. J’ai découvert après cela que ce que faisait ma grand-mère avec moi était identique à ce que faisait la grand-mère de l’écrivain Goutas. Sa grand-mère lui racontait une histoire mais il s’endormait avant la fin. Le lendemain, il raconte à sa nourrice l’histoire intégrale. Et il répète l’histoire à la grand-mère qui lui raconte l’histoire en répétant la même fin. Ce qui a donné à l’écrivain une confiance en soi. Ecrire pour les enfants n’est pas une tâche facile. Voir le sourire d’un enfant après avoir lu une belle histoire n’est égal à aucun autre plaisir. En effet, les enfants sont un public exigeant. Ils s’arrêtent dès la première page si le livre ne leur plaît pas. Ce fut un grand défi pour moi. De même, ce n’est pas parce que vous êtes un bon auteur de livres pour adultes que vous serez un bon auteur de livres pour enfants. C’est un art à part entière ! Quant à moi, j’aime beaucoup les enfants, ils m’attirent même en marchant dans les rues. Tout au long des années précédentes, j ‘ai pu entretenir des amitiés avec les enfants. J’ai une page Facebook au nom de l’émission “Raconte maman Samah” avec 40 mille abonnés qui sont tous des enfants. J’ai quand même été influencée par la façon d’écriture de ma mère. C’est vrai que j’écris pour les enfants mais d’une façon poétique et pas monotone. La façon avec laquelle j’écris un roman pour enfants reflète l’âme de ma mère, d’où son influence évidente sur mes écritures.
• Le Progrès Egyptien : En tant que femme, comment évaluez-vous le statut de la femme en Egypte?
• • SABE: La femme en Egypte a réalisé de pas de géants. Aujourd’hui, un nombre de femmes tiennent des responsabilités ministérielles. Elle a pu accéder à des postes clés sans discrimination. Elle avance à pas sûrs et s’affirme. Je vois que la femme elle-même peut être un obstacle pour son auto-affirmation. Le manque de confiance en ses propres convictions, le manque d’ambition et le fait de céder avant de réaliser son rêve peuvent être ses embûches. Aujourd’hui, on peut voir des femmes pionnières dans tous les domaines. La femme a réussi à faire des réalisations et de progrès. La plupart des patrons de maisons de publications de mes romans sont des femmes. Nous avons par exemple Mme Dalia Ibrahim de Nahdet Masr. Elle était avec la ministre de l’Immigration Nabila au projet “Parle arabe”. Il y a des bonds remarquables des femmes d’affaires qui soutiennent la société civile soit par effort physique, soit financier. Au fait, je suis en train de rédiger un livre intitulé “Des fleurs dans le jardin de l’oubli” qui verra le jour au prochain Salon du livre. Il jettera la lumière sur des femmes pionnières mais peu connues dans la société.
• Le Progrès Egyptien : Face aux chalenges actuels, comment attirer les enfants à la lecture face aux défis du numérique?
• • SABE: Il y a quelques moyens que l’on peut mettre en place avant, pendant et après la lecture, et qui favorisent l’apprentissage de la lecture chez les tout-petits. A mon avis, avant la lecture, on peut tout simplement attirer l’attention de l’enfant sur la page de couverture, feuilleter le livre, regard-er les images avec lui. Cela lui permet de s’auto-sensibiliser au contenu du livre, ainsi qu’à son contenant. Il faut rédiger des romans qui respect-ent la mentalité des enfants d’aujourd’hui et non pas leur parler d’une manière révolue. Il faut sur-prendre l’enfant, d’après même le titre du roman. Pas de titres banals. Vous pouvez aussi lui poser quelques questions : de quoi parlera-t-on dans le livre? Qui sera le personnage principal? Qu’est-ce qui pourrait lui arriver? Que connais-tu sur tel ou tel personnage? Etc. C’est ainsi qu’il aimera la lecture dès son bas âge.
• Le Progrès Egyptien : Certes, après ce succès, il y avait un mari qui soutient et encourage, Aimeriez-vous nous parler de lui?
• • SABE: Oui, c’est vrai. Mon mari m’encourage et il est pour moi, un soutien inestimable. Il est très content de chaque pas que j’entreprends dans ma vie. Il respecte bien le travail de la femme ainsi que mes choix dans la vie.
Un scoop pour Le Progrès Egyptien
“Le cercle confus” choisi sur la liste d’honneur de IBBY
J’ai un roman qui a été choisi par International Board on Books for Young People (IBBY), en français : l’Union internationale pour les livres de jeunesse. C’est une association internationale à but non lucratif créée pour développer la littérature pour la jeu-nesse et l’alphabétisation. Son congrès se réunit chaque deux ans. Cette union a plusieurs branches dont le Conseil national émirati, égyptien et jor-danien. Cette union choisit de chaque pays un roman pour être placé sur ce qu’on appelle “l’Honor List” (liste d’honneur). Cette année, je représen-te l’Egypte avec le roman intitulé “ La cercle confus” qui discute d’une question philosophique très impor-tante mais d’une façon très simple. Le Thème principal du roman est « Différence ne veut pas dire désaccord ». Le jury est des étrangères. C’est un prix loin de toute faveur mais en guise de compliment et en l’honneur d’un long trajet. L’histoire sera traduite en 6 ou 7 langues étrangères. Son choix est fondé sur le fait que le roman est universel et peut être lu par n’importe quel enfant dans le monde. Il n’est lié à une question spécifique à l’Egypte ou à un problème qui ne concerne que notre pays uniquement.