L’âge ne devrait jamais être un obstacle à nos rêves et ambitions. La détermination et la passion peuvent nous pousser à réaliser des choses que nous n’aurions jamais cru possibles. Chaque étape que nous franchissons, peu importe notre âge, enrichit notre expérience et donne un sens à notre vie. L’essentiel est de croire en soi et de viser haut.
Ayman Ibrahim, nageur avec palmes, en est un exemple inspirant. Le Progrès Egyptien a eu le plaisir de faire un entretien à cœur ouvert avec ce champion qui a entamé son parcours professionnel à l’âge adulte. Bonne lecture.
Par : Hanaa Khachaba
La persévérance, c’est son mot clé. Ayman Ibrahim, père de famille âgé bientôt de 48 ans, est un nageur avec palmes professionnel. Pour lui, nager donne une seconde vie et aide à déstresser. Sans jamais s’absenter des séances d’entraînement malgré certaines circonstances familiales difficiles, notre champion a enchaîné les succès. Il rêve grand et compte devenir un champion du monde dans la nage avec palmes.
Le Progrès Egyptien : Qu’est-ce qui vous a poussé à commencer la natation à l’âge adulte ?
Ayman : J’étais déjà un boxeur. J’ai commencé à pratiquer la boxe anglaise à l’âge de 12 ans jusqu’à 20 ans. De retour de France où j’ai vécu pendant six ans, je me suis fait embaucher à un centre d’appels, situé dans le quartier de Maadi (au Caire). Mon collègue m’a proposé de faire de la natation, affirmant que c’est un très bon sport « complet ». J’ai alors commencé à suivre mes premiers cours de natation à Madinet Nasr, avec des entraîneurs compétents.
Le Progrès Egyptien : Quelles étaient vos motivations initiales lorsque vous avez décidé de vous lancer dans la natation professionnelle ?
Ayman : C’est vrai que je faisais de la natation pendant deux ans au début, donc à partir de l’âge de 43 ans. C’était en septembre 2019 quand j’avais commencé à prendre des cours de natation pour la première fois, à Madinet Nasr. Quand la société où je travaille a décidé qu’on travaille de chez soi, je suis en fait rentré dans ma ville natale, Samanoud(au centre du Delta du Nil, à 120 km du Caire). Depuis Samanoud, je faisais du télétravail.
Par coup de chance, j’ai appris qu’un groupe de docteurs avaient l’intention de construire une piscine dans ma petite ville natale, à mon très grand bonheur. J’ai été très content en fait. Alors je me suis dit, je travaille de chez moi puis après j’irai nager. D’abord, je faisais de la nage libre, sans palmes. Un jour, le directeur de cette nouvelle piscine m’a proposé de m’essayer dans la nage avec palmes, m’assurant que je vais remporter deux ou trois médailles. Ce sont ses propos qui m’ont poussé à commencer à faire de la nage avec des palmes professionnelle.
Le Progrès Egyptien : Quels défis avez-vous rencontrés en commençant votre carrière à un âge plus avancé par rapport à vos pairs ?
Ayman : J’ai rencontré des difficultés au début, bien évidemment. Je ne savais pas faire la culbute : c’est quand on arrive au mur et on doit se tourner en poussant des pieds. Avec les palmes, c’était un peu trop difficile. J’ai vraiment galéré au début pour pouvoir finalement y arriver. Alhamdulillah, avec beaucoup plus de persévérance, et mon envie d’aller plus loin, j’ai réussi mes culbutes. C’est grâce aussi à mon entraîneur, capitaine Hennawy, qui était vraiment bien. Le défi que j’ai dû relever c’était de devoir retenir ma respiration pendant la culbute.
Le Progrès Egyptien : Comment a été votre approche de l’entraînement pour atteindre un niveau professionnel ?
Ayman : Au début, je m’entraînais au mois de Ramadan, même dans la journée, alors que j’étais en jeûne. J’arrivais à tenir pendant une heure et demie de natation. Je vous assure que ce n’est pas du tout facile. Mais avec la volonté, j’y arrivais, alhamdulillah.
Le Progrès Egyptien : Pouvez-vous décrire une journée typique d’entraînement pour vous ?
Ayman : C’est un entraînement de deux heures. Je commence par un échauffement de 400 mètres de nage libre sans palme, en plus de 200 mètres de battements de pied. S’ensuit l’entraînement : une série de 20 X 25 mètres nage libre ou une série de 40 X 25 mètres, avec trente secondes seulement de repos, ce qui est extrêmement fatigant, car la série doit être accomplie à la vitesse maximale. Ce sont ces entraînements qui me rendent plus performant et me permettent d’atteindre mes objectifs et remporter des médailles.
Le Progrès Egyptien : Quelle a été votre première compétition importante, et comment vous êtes-vous senti à cette occasion ?
Ayman : La première compétition importante pour moi, c’était le championnat de Port-Saïd lors duquel j’ai gagné deux médailles, de bronze et d’argent, il y a deux ans, en février 2022. C’était la première fois de ma vie que je participais à une compétition. Il y a aussi le championnat d’hiver et le championnat d’été. Après ce championnat, j’ai battu mon score (30 sec, 50 m) et enregistré (28 sec, 50m). C’était vraiment pour moi une grande joie. Je me suis alors dit qu’il faut persévérer, il faut continuer et prouver que l’âge ne compte pas en fait. Ce n’est pas l’âge qui décide. C’est la volonté et la persévérance.
Le Progrès Egyptien : Parmi vos médailles, laquelle est celle dont vous êtes le plus fier, et pourquoi ?
Ayman : Je me suis senti très fier d’avoir décroché mes deux médailles lors de ma première participation au championnat de Port-Saïd. Parmi les médailles qui me tiennent à cœur, c’est la médaille d’or que j’ai remportée quand j’ai chaussé le monopalme et j’ai gagné pour la première fois. Je m’étais en fait entraîné pendant peu de mois et j’ai remporté la première place, alors que je vous rappelle que c’était ma première participation dans une course de nage à monopalme. C’était un grand étonnement pour moi ! Et j’ai également décroché une autre médaille d’or dans le dernier championnat de nage avec palmes, tenu au mois d’août 2024. Alhamdulillah, tout ce succès est grâce à Dieu, bien évidemment, mais aussi grâce à un travail acharné qui m’a permis de me surpasser.
Le Progrès Egyptien : Comment parvenez-vous à équilibrer votre vie personnelle avec les exigences de votre carrière sportive ?
Ayman : C’est difficile de gérer mon travail et d’entretenir ma famille. Mes entraînements m’éloignent en fait de mes enfants et de ma femme qui souhaite me voir assez souvent auprès de nos enfants. J’essaie quand même de les impliquer dans ma vie de sportif pour leur inculquer les valeurs de persévérance et de détermination. Une fois le travail achevé, je me dépêche pour aller nager. Je ne m’absente jamais, c’est ça la persévérance.
Le Progrès Egyptien : Avez-vous des stratégies pour gérer le stress lié à la compétition ?
Ayman : Oui, effectivement, car si l’on rate le départ, on peut avoir DQ, c’est-à-dire être disqualifié et ne plus avoir droit à continuer la course si on ne respecte pas certaines règles. J’ai appris à appliquer les règles pendant mes entraînements avant la compétition. Avant de poser pied sur le bloc, je me concentre sur la respiration ventrale, c’est le secret en fait pour être zen. Il faut apprendre à aspirer profondément, gonfler le ventre comme un ballon de baudruche, et après expirer tout doucement, pendant 8 secondes, en dégonflant le ventre. C’est bien cette technique qui m’a aidé à me concentrer et faire le mieux possible.
Le Progrès Egyptien : Quel impact la natation a-t-elle eu sur votre vie en dehors de la piscine ?
Ayman : La natation me donne de la force physique et mentale également. Elle m’aide à gérer le stress au travail. C’est un très bon sport que je conseille aux jeunes et aux adultes. C’est vraiment magnifique.
Le Progrès Egyptien : Avez-vous des modèles ou des mentors qui vous ont inspiré dans votre parcours ?
Ayman : Quand j’ai appris la natation, je pensais à Michael Phelps, le plus grand nageur de tous les temps en fait. Son histoire m’a beaucoup motivé notamment lorsque j’ai appris qu’il était un enfant autiste et qu’il a réussi à surmonter son handicap et est devenu un champion du monde, à plusieurs reprises, amassant énormément de médailles lors des Jeux Olympiques. J’espère être un champion du monde un jour dans ma tranche d’âge (45-50 ans). Le championnat mondial de la nage avec palmes en eaux libres se tiendra à Alamein, près d’Alexandrie, en octobre 2025. Je compte y participer et je suis super motivé à travailler fort pour monter sur le podium.
Le Progrès Egyptien : Quels sont vos objectifs futurs en tant que nageur ? Envisagez-vous de participer à d’autres compétitions ou événements ?
Ayman : J’envisage de participer au championnat d’hiver de Port-Saïd, début février 2025. Les dates ne sont pas encore précisées. Je prendrai aussi part au championnat d’été de Port-Saïd, prévu pour le mois d’août. Avant cette compétition, il y aura aussi le championnat national de la nage avec palmes qui s’organisera au Stade du Caire, dans la piscine olympique, après le mois de Ramadan, soit au mois de mai 2025. Et finalement, je vous annonce mon intention de participer au Championnat mondial de la nage avec palmes qui se tiendra en Egypte, en octobre 2025.
Le Progrès Egyptien : Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite commencer la natation à un âge adulte ?
Ayman : Le conseil que j’aimerais donner à tous ceux qui souhaitent se consacrer à la natation, c’est qu’il faut persévérer. La natation vous donne une seconde vie, donc il faut toujours avoir de la patience et de la persévérance, même si c’est difficile. Je sais que c’est très difficile surtout au début. J’ai vraiment souffert pour apprendre à me tenir dans l’eau et à ne pas plonger, à gérer ma respiration et retenir mon souffle. La natation demande du travail mental et du travail physique. Pour réussir ce sport, il faut aussi aller régulièrement à la gym, y faire beaucoup de cardio et d’exercices physiques afin de construire un corps bien bâti et bien souple surtout, puisque la natation exige de la souplesse et de la vitesse, bien évidemment.