Si l’Egypte ancienne fascine encore à notre époque, c’est en partie à cause de son écriture. Avec plus de 3000 ans d’histoire, les Pharaons ont su traverser les siècles avec leur art et leur talent incomparable. Les hiéroglyphes, longtemps considérés comme de simples dessins décoratifs, en sont l’une des manifestations les plus remarquables.
La langue, avant d’être écrite, a probablement d’abord été exprimée par les signes, puis parlée. L’écriture est souvent considérée comme la plus grande invention humaine, et l’on s’intéresse de près à sa première apparition car elle est l’élément le plus ancien du langage qui nous soit parvenu. L’Égypte pharaonique a grandement contribué à l’évolution de l’humanité, notamment par l’invention de l’écriture. Grâce à l’écriture, les Égyptiens ont pu dresser des inventaires, conserver la connaissance, développer les genres littéraires que l’on connaît aujourd’hui, comme la poésie, les contes et les mythes et mettre en place une bureaucratie. C’est à l’Égypte que l’on doit le premier modèle d’un État centralisé. Les scribes, des fonctionnaires sous l’ordre des pharaons, avaient pour mandat d’écrire tout ce qui servait à organiser la société : décrets royaux, rapports, contrats etc. Ces documents sont un véritable témoignage sur le mode de vie et la culture de l’époque.
Une origine purement égyptienne
Selon toute vraisemblance, la civilisation égyptienne aurait développé son langage et son écriture tout à fait seule, parallèlement aux méthodes cunéiformes. En effet, les symboles graphiques employés dans cette écriture représentent généralement des éléments locaux de la faune et de la flore, ainsi que des scènes de la vie quotidienne. C’est la raison pour laquelle cette langue semble avoir une origine purement égyptienne. Cependant, il convient d’ajouter que de très anciennes tablettes écrites en cunéiforme ont été retrouvées en Egypte. Ainsi, certains pensent que les égyptiens ont repris et adapté le système sumérien. L’hypothèse est difficilement vérifiable et paraît peu probable étant donné les grandes différences entre les deux types d’écriture.
Le déchiffrement des hiéroglyphes
Pendant des siècles, de nombreux savants ont été tenus en échec devant le déchiffrement des hiéroglyphes. Au début, beaucoup pensaient qu’il ne s’agissait que des simples dessins sans aucun sens. Même si la dimension artistique était recherchée par les anciens égyptiens, elle n’était pas la seule. Il fallut ainsi attendre les années 1810 pour que Champollion parvienne à déchiffrer la mystérieuse écriture. Son génie a été de comprendre que les symboles représentaient non seulement des mots et des idées mais aussi des sons !
Plusieurs évolutions
Bien entendu, au cours des siècles, l’écriture des égyptiens a connu plusieurs évolutions. Par exemple, les hiéroglyphes que nous voyons sur les monuments et les temples était la forme d’expression de l’élite ou des dieux. Compliquée et longue à réaliser, elle était utilisée pour les textes officiels, les récits de bataille du pharaon ou encore les monuments funéraires. C’est pourquoi une autre forme d’écriture est apparue, plus simple et plus rapide : le hiératique (qui vient du grec hiératikos (sacré). Elle était très utilisée dans l’administration par les scribes. Cela leur permettait de transcrire rapidement leurs documents en vue de les archiver par exemple. Devant le grand nombre de textes à écrire, peu à peu, les scribes mirent en place une autre forme d’écriture, encore simplifiée par rapport au hiératique : le démotique. Le mot vient du grec demos (populaire). Le hiératique fut, quant à lui, cantonné aux textes religieux (d’où son nom), remplacé par le démotique au niveau de l’administration. La dernière évolution de la langue égyptienne fut ce qu’on a appelé le copte. Sur le déclin, cette civilisation est passée sous domination romaine et grecque. Contrainte et forcée, elle dut également se résoudre à adopter le Christianisme. Ce brassage a eu pour résultat la langue copte. Le mot faisant aussi référence aux premiers chrétiens d’Egypte. Directement dérivée du grec, la langue copte comporte tout de même quelques différences. En effet, certains des symboles ne renvoient à aucun son en grec mais s’apparentent plutôt au démotique. C’est la raison pour laquelle on a rajouté à l’alphabet d’origine de 24 lettres, 7 autres graphèmes, directement tirés du démotique. Le résultat fut donc un système de 31 lettres donnant ainsi un nouvel aspect à l’écriture égyptienne à savoir le concept de majuscule et de minuscule. L’Origine grecque de cet alphabet est évidente en comparant ne serait-ce que certains symboles. C’est cette langue qui a grandement aidé Champollion à traduire les hiéroglyphes. En effet, grâce à ses similitudes avec le démotique et en connaissant le copte, il a réussi à remonter jusqu’aux hiéroglyphes et à déduire leur sens. L’utilisation de l’alphabet copte en Egypte s’est accompagnée de nombreux bouleversements sur le plan de l’écriture. Par exemple, dans le cas du démotique, les scribes avaient l’habitude d’écrire de droite à gauche. Suite à l’influence grecque, le sens d’écriture s’inversa pour passer de gauche à droite. Tout au long de cet article, il a été question de plusieurs formes de langage qui se sont influencées mutuellement, évoluant ainsi vers une autre forme d’écriture. Il serait donc intéressant d’expliquer les mécanismes qui aboutissent à de tels brassages. Le meilleur moyen pour une culture de s’étendre et d’accroître son influence, était d’emprunter les routes commerciales. L’autre solution était bien entendu les guerres et les conquêtes. En général, si une civilisation venait à conquérir une autre, elle lui imposait ses normes culturelles. Ainsi, à travers les flux humains et marchands, les méthodes d’écriture s’influencèrent et évoluèrent lentement. Lorsqu’une civilisation ou une population entre en contact avec une langue et une écriture, elle l’assimile puis se l’approprie.