La renaissance après la mort constituait le thème central de la croyance des anciens Égyptiens. Pour ce faire ils se sont dotés de recueils funéraires. Il n’existe pas moins de 16 textes funéraires. Toutefois, certains livres demeurent très difficiles à interpréter, d’autres sont parfaitement connus. La découverte de ces recueils se fit avec la naissance de l’égyptologie et les grandes expéditions et fouilles du XIXe siècle. Ainsi, Jean-François Champollion découvrit dès 1829 des textes funéraires dans les tombes de la vallée des Rois et débuta une traduction. Ce fut Karl Richard Lepsius qui inventa le terme le Livre des Morts. Il publia en 1867, les premiers Textes des Sarcophages. Gaston Maspero découvrit la première pyramide à textes en 1881. Elle contenait les “Textes des Pyramides”, qui furent le corpus fondateur des livres funéraires Égyptiens. Aperçu…
Présenté par: Marwa Mourad
Les Textes des Pyramides
• Textes de la pyramide d’Ounas
Les Textes des Pyramides sont les plus anciens écrits religieux connus à ce jour. C’était la somme des conceptions funéraires des Égyptiens de l’Ancien Empire (2647-2150). Leur origine demeure obscure. Leur forme fut formalisée et gravée sur les parois des pyramides à partir du règne d’Ounas (2356-2323). Avant cette apparition, les décors et les textes tapissaient les murs des temples funéraires et non la tombe en elle-même. Une des causes de cette rupture fut l’émergence du Dieu Osiris et de son culte.
Ces textes n’apparurent pas subitement, ils furent l’héritage d’une longue tradition funéraire prenant racine dans la période Prédynastique (v.3500-v.3150). Le plus célèbre des textes est sans aucun doute l’Hymne cannibale (constitué par les chapitres 273-274) gravé dans l’antichambre de la tombe du Roi Ounas. Les Textes des Pyramides étaient gravés en colonnes verticales sur les murs des corridors, des antichambres et des chambres funéraires avec une géographie précise. Les plafonds étaient couverts d’étoiles. À la fin des années 1980, James Peter Allen proposa qu’on les lise à partir du sarcophage jusque vers l’extérieur de la tombe. Deux décennies plus tard, en 2009, Harold M.Hays remit en cause cette approche textuelle. Selon lui, les chambres souterraines des pyramides ne symbolisaient pas des régions mythiques. Harold M.Hays reprit en fait une argumentation énoncée par Jan Assmann en 1999. Une formule des Textes des Pyramides était par conséquent moins compréhensible prise isolément qu’en série.
Les Textes des Sarcophages
Sarcophage extérieur du Chancelier Nakhti – XIIe dynastie – Musée du Louvre
Les Textes des Sarcophages étaient des textes peints à l’intérieur des cercueils surtout du Moyen Empire (2022-1650), et très rarement sur des papyrus. Ils résultent d’une extension des rites funéraires jusque-là réservés au Roi, et d’une utilisation des Textes des Pyramides, auxquels s’ajoutent de nouvelles formules. L’origine de ces textes demeure cependant incertaine malgré les récentes découvertes et les nouvelles études qui démontrent qu’il existe bel et bien un lien entre eux et l’ensembles des Textes des Pyramides, sans pour autant parler d’une transition directe. Ce dont nous sommes sûr c’est que ces textes prirent racine durant l’Ancien Empire (2647-2150). Les Textes furent retrouvés dans des tombes des Gouverneurs (ou Nomarques) de ces provinces et de hauts-fonctionnaires, preuve qu’il y eut une démocratisation, certes limitée à quelques privilégiés, des textes funéraires et de l’immortalité. Il s’agit cependant d’une évolution capitale dans la pensée Égyptienne de l’au-delà.
Les Textes des Sarcophages sont des formules magiques destinées à préserver le mort, lors de son voyage vers l’au-delà, de la faim, de la soif et de tous dangers potentiels. Ils sont divisés en 1185 chapitres (ou unités), mais selon le cercueil, le contenu varie énormément, avec sans doute, une tradition locale. Leur longueur est donc très variable, si certaines ne sont qu’une simple phrase, d’autres forment de véritables paragraphes avec introduction et conclusion.
Le Livre des Morts
Scène issue du papyrus du Livre des
Morts d’Hounéfer montrant la pesée
du cœur – British Museum
Le Livre des Morts (ou Livre pour Sortir au Jour ou Livre pour Émerger Vers la Lumière) fut dans la continuité des Textes précédents. Il est sans aucun doute le livre funéraire le plus connu et le plus reproduit de l’Égypte ancienne. Il s’agit de rouleaux de papyrus, essentiellement rédigés en hiéroglyphes. Ses chapitres illustrés ont beaucoup contribué à cette notoriété. Le Livre des Morts apparaît durant la XVIIe dynastie (1625-1549) dans la région de Thèbes. Ce livre fut utilisé aussi bien pour les tombes privées que royales. Le Livre des Morts fut aussi bien copié sur des papyrus, jusqu’à l’époque Romaine (30 av.J.C-642 ap.J.C), que peint et gravé sur les parois des tombeaux (couloir, chambre etc.). Les rouleaux de papyrus pouvaient être placés à proximité de la momie ou contre celle-ci, dans les bandelettes.
Le Livre des Morts était personnel, les scribes personnalisaient le texte notamment avec le nom du défunt. Son contenu varie beaucoup d’un texte à un autre. Les différents exemplaires connus ne sont donc pas tous identiques, car le bénéficiaire choisissait les formules qui lui convenaient. Le papyrus le plus complet est celui d’Ani découvert en 1887, à Louxor. Il mesure 23 mètres et fut malheureusement découpé en 37 feuilles pour être exposé au British Muséum. Le Livre des Morts était un guide pour le défunt afin de passer les obstacles, de réussir la pesée du cœur et d’accéder au royaume des morts d’Osiris pour y vivre pour l’éternité. Le Livre décrivait la procession funéraire, l’ouverture de la bouche, la renaissance, la transfiguration, le monde souterrain.
Le Livre des Portes
Représentation des différentes races de l’humanité dans le Livre des Portes par Giovanni Battista Belzoni
Le Livre des Portes pour certains chercheurs vit sa première apparition au début du Nouvel Empire (1549 ou 1540-1080), d’autres la situe sous le règne d’Horemheb (132 -1295) ou de Ramsès I (1295-1294). Son nom, “Livre des Portes”, lui fut donné par Gaston Maspero. Il raconte le passage de l’esprit du défunt dans le monde de l’au-delà, correspondant au voyage du soleil, le Dieu Rê, à travers le monde souterrain pendant les heures de la nuit. L’esprit, l’âme, était nécessaire pour passer à travers une série de “portes” à différentes étapes du voyage au pays des morts. Chaque porte était associée à une Déesse particulière et exigeait que le défunt reconnut le caractère distinctif de cette divinité. Le texte implique que certaines personnes traversait indemne, mais que d’autres souffrait le tourment dans un “lac de feu”. La partie la plus célèbre du Livre des Portes désigne les différentes races de l’humanité connues par les Égyptiens. Ils les divisaient en quatre catégories qui sont aujourd’hui classiquement étiquetées : “Reth” (Égyptiens), “Aamu” (Asiatiques), “Themehu” (Libyens) et “Nehesu” (Nubiens). Ces deniers sont représentés en procession entrant dans le monde suivant. Quatre groupes, chaque groupe contenant quatre hommes : Le premier est “Reth”, le second est “Aamu”, les troisièmes est “Nehesu” et le quatrième est “Themehu”. Le texte et les images associées avec le Livre des Portes apparaissent dans de nombreuses tombes du Nouvel Empire, y compris toutes les tombes royales entre Horemheb et Ramsès VII (1136-1129).
Le Livre de la Terre
Livre de la Terre dans KV9 – Paroi Sud
Le Livre de la Terre, fut appelé par beaucoup de noms tels que : Livre de la Création du Disque Solaire ou le Livre d’Aker. Il apparaît principalement dans les tombes : KV8 de Mérenptah (1213-1203), KV14 de la Reine Taousert (1188-1186), KV11 de Ramsès III (1184-1153), KV9 de Ramsès VI (1143-1136) et KV1 de Ramsès VII et servit de contrepartie au Livre des Cavernes. Il y eut quelques scènes supplémentaires, trouvées sur les murs des autres tombes royales s’étendant à partir du Nouvel Empire (1549 ou 1540-1080) jusqu’à la Basse époque (656-332), mais comme beaucoup de scènes du Livre, généralement, elle sont dispersées, l’ordre des illustrations étant compliqué. Jean-François Champollion fut le premier à publier les scènes et textes de la tombe de Ramsès VI dans son “Monuments de l’Égypte” où il déchiffra les hiéroglyphes représentés dans les tombes. Alexandre Piankoff fut le premier à vraiment étudier la composition des images et des hiéroglyphes.
Le Livre de la Terre utilise également le disque solaire comme thème récurrent. Les scènes sont orientées vers la droite et les illustrations peuvent être lues de droite à gauche. Ce qui est en contradiction avec la configuration typique décrite par Alexandre Piankoff. Piankoff a identifié quatre parties au Livre de la Terre, qu’il note de A à D. Friedrich Abitz y ajoute une partie E, correspondant à des scènes trouvées sur les côtés d’un pilier. Ces éléments comprennent le thème de la création du disque solaire et le thème du Dieu soleil, le voyage de Rê dans le monde souterrain, hors de la lumière.
Le Livre du Jour et le Livre de la Nuit
Plafond de la tombe de Ramsès VI avec une version du Livre du Jour et du Livre de la Nuit
Le Livre du Jour décrit le périple diurne (donc durant la journée) du soleil, à l’intérieur du ventre de Nout, de l’aube au coucher. La plus ancienne version date du règne de Ramsès VI (1143-1136), puis on en trouva d’autre dans les tombes royales de Tanis. L’image de la Déesse, connue sous le nom de dame du ciel et des étoiles, mère du soleil structure la composition et l’organisation du texte, Le Livre de la Nuit, fait le périple inverse et complète le Livre du Jour. Chaque heure comporte une introduction décrivant les éléments importants. Sa plus ancienne version date du règne de Seti I (1294-1279). Chaque soir, la divinité avale l’astre qui traverse son corps pour renaître au matin. Comme dit plus haut on trouve une illustration de ces Livres sur le plafond astronomique de la chambre funéraire du tombeau (KV9) de Ramsès VI dans la vallée des Rois, ainsi que quelques passages dans le temple funéraire de Ramsès III (1184-1153) à Médinet Habou.