Parler, c’est bien plus qu’un simple moyen de communication : c’est un art. En Egypte, où les mots rythment la vie quotidienne, ce que l’on dit – ou ce que l’on se tait – révèle bien des facettes de notre personnalité. Mentir, enjoliver, se taire ou s’exprimer avec exagération: chaque mot porte un poids, chaque expression une histoire. Plongeons dans l’univers riche et savoureux des expressions populaires égyptiennes.
Biaflem : le conteur d’histoires farfelues
L’expression «biaflem» tire son origine du mot «film» et désigne une personne qui brode des histoires absurdes ou vides de sens. Ce terme décrit aussi ceux qui jouent avec les mots, souvent pour se moquer ou se donner en spectacle. Elle évoque l’esprit de la chanson “Mon mec à moi” de Patricia Kaas, où les paroles sont parfois des artifices pour enjoliver une réalité bien ordinaire.
Wakel Sad el-Hanak :
Le silence par lassitude
*Sad el-Hanak*, littéralement « bouche fermée », est un dessert égyptien à base de beurre et de farine, si lourd qu’il coupe toute envie de manger. Dire d’une personne qu’elle est *wakel sad el-hanak* signifie qu’elle a perdu l’envie de parler, généralement à cause de mécontentement ou de frustration. Une manière imagée de montrer comment le poids des émotions peut clouer le bec à n’importe qui.
Tarallali : Un grain de folie amusant
L’expression «tarallali» s’adresse à ceux dont le comportement semble un peu démesuré, voire extravagant. Accompagnée d’un geste imitant la folie, elle est le plus souvent utilisée avec légèreté et humour, sans connotation péjorative. Elle peut aussi décrire une situation totalement absurde, résumée par l’expression «el-wad’e tarallali» (la situation est folle).
Mat el-Kallam : Quand les mots s’éteignent
« Mat el-Kallam », littéralement « les mots sont morts », illustre le moment où la parole devient inutile.
Cette formule s’emploie lorsque deux personnes n’ont plus rien à se dire ou quand poursuivre une discussion semble vain. Une invitation subtile à laisser le silence reprendre ses droits.
Proverbes
El-hitane liha widane :
Les murs ont des oreilles
Ce proverbe rappelle que les paroles ne sont jamais entièrement à l’abri des indiscrétions.
Il invite à la prudence, car ce qui est entendu peut être déformé et utilisé contre nous. Une mise en garde universelle que l’on retrouve en français sous l’expression: «les murs ont des oreilles».
Min taqetaq lissalamoualékou : De A à Z
Cette expression imagée signifie raconter une histoire dans ses moindres détails, sans rien omettre. *Taqetaq* évoque le bruit d’une personne frappant à la porte (*toc toc*), tandis que *salamoualékou* signifie «au revoir». Une manière poétique de symboliser un récit complet, du début à la fin.
À travers ces expressions et proverbes, la culture égyptienne déploie toute sa richesse et son ingéniosité. Chaque mot, chaque phrase, est une porte ouverte sur une manière unique de penser et de raconter le monde.