Par les villages est l’épopée du quotidien. Un chantier, des ouvriers, un village, la vie de chaque jour deviennent la matière d’une vie autre, à laquelle on ne prêtait jusque-là pas attention. C’est cela que raconte le poème dramatique.
Par Marwa Mourad
De quoi il s’agit ?
L’un des frères parti pour la ville, devenu écrivain, est exclu du village par les autres. À son retour, le village est métamorphosé par la vie moderne. Pancartes et panneaux indicateurs ont tout envahi. Pourtant tout bascule déjà dans une ère nouvelle, celle de Nova qui ne proclame aucune vérité nouvelle mais annonce un regard nouveau. “Laissez s’épanouir les couleurs” dit-elle.
Quel en est le but ?
C’est un théâtre du langage le plus simple et le plus ample qui soit. Dix personnages, des gens ordinaires pour peu qu’on les entende, sont porteurs de mondes inépuisables et toujours inattendus. La parole ici fait voir l’intime des choses, des faits et des gestes. Il y est parlé de ce qu’on néglige, de cet essentiel que l’on élude et qui fonde tout ce qui a lieu ; les mots deviennent des images et le théâtre se fait récit. Le quotidien devient monumental, l’insignifiant se fait grand. Une épopée du quotidien où chacun des personnages parle par et pour les autres. Nova réinvente le monde tel qu’il est et chacun est toujours autre : c’est peut-être ce que veut montrer ce “poème dramatique”
Qui est Peter Handke ?
Peter Handke est né pendant la guerre en Carinthie, la province sud de l’Autriche, mais passe sa petite enfance à Berlin-Est où sa mère est remariée avec un conducteur de tramway alcoolique. Il publie ses premiers textes dans le journal du lycée où il est pensionnaire. Il commence des études de droit à l’Université de Graz mais les interrompt quand un important éditeur allemand, Suhrkamp, accepte son premier roman, Les frelons, en 1965. L’année suivante il présente au Groupe 47, fondé en 1947 par des écrivains, Heinrich Böll, Günther Grass, Siegfried Lenz, soucieux de faire repartir la littérature allemande sur de nouvelles bases après la guerre, une pièce de théâtre provocante, Outrage au public. Dès lors, il publie régulièrement, parfois plusieurs titres par an, dans les domaines les plus divers, romans, essais, pièces de théâtre, récits des nombreux voyages qu’il fait pendant les années 80. L’un d’eux, Voyage hivernal sur le Danube, fait scandale en 1996 car Handke défend la Serbie et son président Milosevic et les présente comme des victimes. Dix ans plus tard, s’il refuse de venir défendre Milosevic devant le tribunal de La Haye, il écrit cependant Les tables de Daimiel en guise de plaidoyer. Peter Handke, qui est également cinéaste, vit en France depuis une vingtaine d’années et publie au même rythme soutenu, trois livres sont parus en 2012, Les beaux jours d’Aranjuez, Toujours la tempête et Une année dite au sortir de la nuit.