Seules 30 % des personnes ayant recours à la psychothérapie sont des hommes. Cette proportion témoigne de la prégnance de modèles de virilité, où la fierté et le déni prennent le pas sur la santé mentale. Pourquoi consulter un psychologue reste considéré comme un aveu de faiblesse pour les hommes?
Selon les données de l’enquête menée par Maud Le Rest, ce sont la fierté et la compétition, des notions fortement associées à une certaine vision de la virilité, qui empêchent souvent les hommes de consulter : pour beaucoup, la psychiatrie demeure une pratique féminine, toujours repoussoir. Exprimer ses angoisses contrarie le modèle de masculinité hégémonique et renvoie à la concurrence qui existe entre les individus : “On aura peut-être moins de valeur auprès des autres hommes”, selon radiofrance.fr.
Au cabinet, que le psychiatre soit un homme ou une femme (le plus souvent), le patient homme se sent à nouveau en compétition et cherche à s’imposer : l’échange médical demeure une relation verticale qui, semblerait-il, met l’individu masculin en danger dans sa propre virilité. Mickaël Worms-Erhminger revient sur l’héritage historique de cette vision concurrentielle de la masculinité: ” On a encore les générations précédentes qui ont une grosse importance sur nos modes de pensée, justement où il y a l’homme, le père de famille qui doit travailler, gagner l’argent, etc. pour protéger sa femme et ses enfants”.
Entre hommes et femmes, le genre détermine l’expression des symptômes, explique Claire-Lise Alvarez. Chez les hommes, on remarque des signes particulièrement externalisés, tels que les accès de violence ou les problèmes d’addiction; contrairement aux idées reçues, ce sont les femmes qui internalisent davantage leurs émotions, rappelle la psychiatre. Parce que certains comportements sont davantage acceptés chez les hommes (comme la consommation excessive d’alcool), ceux-ci “passent souvent entre les gouttes”.Finalement, on remarque que ce manque de suivi psychiatrique des hommes porte de sérieuses conséquences: 75 pourcent des morts par suicide concernent des individus masculins. Ce chiffre est d’autant plus problématique qu’à l’inverse des femmes, il n’est plus en baisse.