Le Kids Online Safety Act entend s’attaquer aux dommages que causent les réseaux sociaux chez les jeunes Américains, en exigeant des plateformes qu’elles mettent en œuvre davantage de mesures pour protéger les jeunes utilisateurs. Mais les défenseurs de la liberté d’expression et des droits humains affirment qu’elle risque de se transformer en un outil de censure de masse, peut-on lire sur La Tribune par Guillaume Renouard.
Mieux protéger les mineurs sur la toile est un objectif qui met tout le monde d’accord, et c’est sans doute ce qui vaut au Kids Online Safety Act (KOSA) de recueillir des soutiens chez les républicains comme chez les démocrates, dans un paysage politique américain conflictuel et survolté. Mais la manière dont la loi entend s’y prendre pour préserver les jeunes internautes suscite aussi l’opposition de nombreuses associations, qui y voient un danger pour la liberté d’expression.
Obliger les Gafam à protéger les jeunes internautes
Dans le courant de l’été, une commission permanente du Sénat a approuvé le projet de loi à l’unanimité, ouvrant la voie vers un vote à la chambre haute du Congrès, où ce projet dispose de nombreux soutiens des deux côtés de l’échiquier politique, et aurait donc de bonnes chances de passer malgré la courte majorité dont bénéficient les démocrates au Sénat.
La grande idée du KOSA est de contraindre les plateformes en ligne comme Facebook, Twitter et YouTube à prendre des mesures supplémentaires pour protéger les mineurs. En particulier, elle vise à créer un devoir de diligence(« duty of care » dans la langue de Shakespeare) afin de rendre les plateformes responsables devant la justice dans le cas où un mineur subirait des dommages psychologiques après y avoir été confronté à un contenu violent, haineux, sexuel ou autre. La loi donne également la possibilité aux procureurs généraux des différents États de l’Union de poursuivre les plateformes en justice en cas de dommages subis par des mineurs de leur État.
« Notre proposition de loi fournit les outils adaptés pour empêcher les géants technologiques de diriger des contenus toxiques vers les enfants et de leur demander des comptes lorsqu’ils placent le profit devant la sécurité », a ainsi déclaré Richard Blumenthal, sénateur démocrate du Connecticut et l’un des champions de la proposition. « Une crise sanitaire d’envergure nationale affecte les adolescents, avec des niveaux records de désespoir et de dépression. Elle a été nourrie par des algorithmes qui fonctionnent comme des boîtes noires et nourrissent les troubles de l’alimentation, le cyber harcèlement, les pensées suicidaires et bien d’autres choses », justifie-t-il.
Le Congrès américain est très proche de l’adoption des deux projets de loi controversés visant prétendument à protéger les enfants sur Internet. La commission du commerce du Sénat a voté en faveur de deux projets de loi sur la protection de la vie privée et la sécurité des enfants qui ont suscité une tempête de critiques de la part des groupes de défense des libertés civiles qui estiment que ces projets de loi feront plus de mal que de bien aux enfants sur Internet. Les experts avertissent également que ces deux projets de loi rendront l’écosystème Internet moins sûr pour les enfants en renforçant la surveillance numérique et en réduisant l’accès aux services chiffrés.
Les projets de loi – Kids Online Safety Act (KOSA) et COPPA 2.0 – ont été approuvés par la commission sénatoriale du commerce, par un vote unanime. Ces deux textes visent prétendument à lutter contre la crise de santé mentale qui frappe les jeunes dans le pays et que certains législateurs accusent les médias sociaux d’avoir intensifiée. Cependant, les détracteurs de ces projets de loi affirment depuis longtemps qu’ils pourraient causer plus de mal que de bien, en obligeant par exemple les plateformes numériques de médias sociaux à collecter davantage d’informations sur les utilisateurs afin d’appliquer correctement les nouvelles règles du Congrès.
La loi KOSA est censée établir une nouvelle norme juridique pour la Commission fédérale du commerce (FTC) et les procureurs généraux des États, leur permettant de sanctionner les entreprises qui ne parviennent pas à empêcher les enfants de voir des contenus préjudiciables sur leurs plateformes. Les auteurs des projets de loi, les sénateurs Marsha Blackburn (R-TN) et Richard Blumenthal (D-CT), affirment que les projets de loi empêchent les enfants de voir des contenus qui glorifient les troubles de l’alimentation, les pensées suicidaires, la toxicomanie et les jeux d’argent. Selon eux, “ces projets de loi mettent les enfants à l’abri des dangers d’Internet”.