Par Samir Abdel-Ghany
Une exploration artistique sous le prisme d’un maître à la galerie Picasso
L’artiste égyptien Samir Fouad a ouvert une fenêtre sur ses soixante années de création artistique à la galerie Picasso, dévoilant un parcours où la quête de lumière intérieure l’a éloigné des sentiers sombres de l’ordinaire pour atteindre une créativité éblouissante et inextinguible. Derrière chaque tableau, une réflexion, un engagement, et une alchimie où travail rigoureux et inspiration se mêlent harmonieusement.
Samir Fouad se compare volontiers à Naguib Mahfouz, soulignant l’importance du travail régulier, presque méthodique, pour libérer son potentiel créatif. “Il ne s’agit pas de caprices ou d’attendre l’inspiration, mais d’un engagement quotidien. Cet exercice aiguise les sens et facilite l’expression des idées. Ce que vous cherchez, vous le trouverez en vous-même”, confie-t-il avec un sourire empreint de sagesse.
Pour Fouad, la vraie grandeur d’un artiste réside aussi dans sa capacité à reconnaître ses sources d’inspiration. “En Europe, les artistes proclament avec fierté leurs influences. Chez nous, dans l’Orient, cela est parfois perçu comme une faiblesse, une immaturité artistique”, déplore-t-il. Son propre séjour en Europe et son mariage avec une Anglaise lui ont appris à embrasser cette transparence, une qualité qu’il considère essentielle pour progresser.
À 73 ans, Fouad envisage l’avenir avec une ambition renouvelée : “Si j’avais encore dix années devant moi, je me consacrerais à l’abstraction pure. À ce stade, un artiste n’a plus besoin de prouver sa maîtrise des détails ; il a déjà fait ses preuves. L’essence des choses devient primordiale.” Il aspire également à écrire sur son enfance dans le quartier de Héliopolis, qu’il chérit profondément, et sur son aventure dans l’univers des arts.
Fouad révèle une fascination singulière pour la musique, qu’il décrit comme une présence omniprésente dans son âme. “Chaque tableau est une mélodie, une lettre d’amour offerte au spectateur”, affirme-t-il. Quant à la femme, elle occupe une place centrale dans son œuvre : “Elle incarne l’Égypte. Que ce soit une figure en noir avançant dans un contexte oppressif ou une femme sans visage gisant au sol, mes peintures reflètent les douleurs et les luttes des femmes dans notre société.”
Samir Fouad ne regarde pas ses anciennes œuvres avec complaisance, mais avec l’œil acéré d’un critique. Il évoque notamment son exposition Lahm de 2010, qu’il considère prophétique, annonçant les bouleversements de la révolution de 2011.
L’humour, parfois caustique, est une composante essentielle de son travail. Il rappelle ses débuts dans le dessin caricatural, où son trait mordant a laissé une empreinte durable. Cependant, il insiste : “Ce n’est pas pour amuser, mais pour réfléchir sur nos travers.”
Fouad n’oublie jamais ses mentors, notamment Hassan Soliman, qu’il considère comme celui qui a transformé sa passion en profession. Il adresse aussi une reconnaissance sincère aux critiques artistiques, qu’il décrit comme des visionnaires capables d’éclairer l’artiste sur des chemins insoupçonnés.
Lorsqu’une amie lui a demandé s’il envisageait de prendre du repos, sa réponse fut éloquente : “Ma sérénité réside dans la peinture. Mes pinceaux et mes couleurs sont ma source de bonheur. Arrêter de peindre, ce serait mourir.”
Avec cette exposition à la galerie Picasso, Samir Fouad prouve une fois de plus que son art n’est pas seulement une quête personnelle, mais une conversation avec l’universel, où chaque tableau porte un souffle d’humanité et une lueur d’éternité.